Quelque chose de l'éternité perce encore dans les premiers rayons du jour,
Mais rien ne se décèle du surgissement dans l'or sublimé du soir.
Il vaut mieux s'endormir dans la nuit qui vient et,
se levant avant l'aube
guetter le jaillissement de tout le Possible au-delà de l' Être,
ouvrir les yeux quand l'origine sans fin, soudain, est de retour,
et rester ébloui.
Pascal Quignard, Critique du jugement, Éditions Galilée 2015 ( page 136)
mardi 13 octobre 2015
dimanche 19 avril 2015
les hauts lieux
« Ici, c'est un haut lieu, vois-tu.
- Qu'est-ce qu'un haut lieu ? lui dis-je.
- Un haut lieu, dit-il, c'est un arpent de géographie fécondé par les larmes de l'Histoire, un morceau de territoire sacralisé par une geste, maudit par une tragédie, un terrain qui, par-delà les siècles, continue d'irradier l'écho des souffrances tues ou des gloires passées. C'est un paysage béni par les larmes et le sang. Tu te tiens devant et , soudain, tu éprouves une présence, un surgissement, la manifestation d'un je-ne-sais-quoi. C'est l'écho de l'Histoire, le rayonnement fossile d'un événement qui sourd du sol, comme une onde. Ici, il y a eu une telle intensité de tragédie en un si court épisode de temps que la géographie ne s'en est pas remise. Les arbres ont repoussé, mais la Terre, elle, continue à souffrir. Quand elle boit trop de sang, elle devient un haut lieu. Alors, il faut la regarder en silence car les fantômes la hantent. »
Sylvain Pesson, Berezina, Éditions Guérin, 2015. Le cinquième jour. De Borissov à Vilnius, p 115
C'est pourquoi les fantômes aiment le silence sur les lieux de mémoire.
dimanche 5 avril 2015
le voyage
L'écriture conduit au voyage; elle est voyager.
" LES IDÉES DE VOYAGE jaillissent au cours d'un précédent périple. L'imagination transporte le voyageur loin du guêpier où il s'est empêtré. Dans le désert du Néguev,on rêvera aux glen écossais; sous la mousson, au Hoggar; dans la face ouest des Drus, d'un week-end en Toscane. L'homme n'est jamais content de son sort, il aspire à autre chose, cultive l'esprit de contradiction, se propulse hors de l'instant. L'insatisfaction est le moteur de ses actes. « Qu'est-ce que je fais là?» est un titre de livre et la seule question qui vaille.
Sylvain Besson, Berezina, Éditions Guérin, 2015.
Page 17, Juillet, Terre de Baffin. Six mois avant le départ.
mercredi 7 janvier 2015
Images
Des images
encore des images
toujours des images
rien que des images
sans fin ni lieu
des noires et des couleurs
fanées flétries floues
sans trêve ni saison
hors de raison.
mercredi 12 novembre 2014
Il n'y a pas photo
Il me prit l'envie - la nécessité - de le photographier. Non par surprise, photos volées, faites de loin, téléobjectif aidant, mais de face, de près, en pleine lumière, lui en pleine connaissance de cause. J'en pris vite l'habitude. L'appareil toujours à portée de la main, en promenade, faisant les courses, en visite, au musée, à une exposition... Je ne m'en séparais plus. J'ai déjà vécu cette manie pour d'autres choses.
Je les lui montrais, naturellement. Je ne suis pas aussi beau que cela , disait-il. La photo ment. Tu trafiques, tu joues avec la lumière. Tu triches avec mon image... Je riais. La photo est peut-être belle, je lui rétorquais, mais le sujet ? Il m'inspire, me donne des idées. Je t'étudie. Je t'observe. Te surprend dans des moments où tu ne t'y attends pas.. Je voudrais à travers elles te connaître... Tu me traques, alors ! Tu m'effaces ! et il riait. L'image emmagasinée et tu es déjà un autre... C'est ainsi que je te vois, seulement à l'instant de la prise de l'image. Et il est déjà trop tard. Je ne t'imagine pas. Je cherche à te peindre, à surprendre sur ton visage tes pensées du moment. L'instant présent. Ton présent.
Qui es-tu pour me troubler ainsi ?
jeudi 16 octobre 2014
Et quand la mer...
Et quand la mer se retirera
t'accompagnant au loin
je resterais sur la plage
cherchant un coquillage
qui porté à mon oreille
me parlera de toi.
16 oct 2014
vendredi 5 septembre 2014
le vent (3)
Ne pourrais-tu tout de douceur
Batifoler et murmurer
Une tendre chanson
Qui me soit seulement caresse ?
*
Tu m'attises et m'attires
De ta souplesse lever les voiles
De tes feuilles aimer l'envers
Avec passion.
*
Tu surgis et rugis
En assauts répétés
Jamais lassé toujours insatisfait
Que serais-je sans toi ?
vendredi 22 août 2014
le vent (2)
Que cherches-tu, ô vent,
Tant de violence en toi
Pour me troubler ainsi
Et qui m'affole tant ?
*
Pour te mieux étreindre
Et ta ramure pénétrer
Ton corps modeler.
jeudi 14 août 2014
le vent
Je me perds et m'égare
Me révèle et chante.
*
Et me voici à terre gisante
Toi, le vent, parti ailleurs,
Ta proie abandonnée.
*
Ainsi nos amours
S'enfuient et meurent
Un air qui passe
Sans portée
Tel un rêve brisé.
dimanche 6 juillet 2014
Soir 16
" L'herbe a envahi le chemin... "
Anton Tchékhov, La Cerisaie.
Nos pas usés
Le silence des arbres est tombé
Goutte à goutte
Le temps distillé.
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