Elle a alors distribué les copies, selon l'ordre alphabétique comme elle les avait classé. Occasion pour elle de mettre un visage sur chaque nom. Sans annoncer les notes, quelques remarques seulement, pour l'un ou pour l'autre.
Elle n'avait pas rendu quatre devoirs qu'une voix a désiré qu'elle précise chaque fois la note obtenue, souhait immédiatement soutenu par l'ensemble du groupe. Elle avait tout bonnement oublié l'esprit de compétition qui anime fondamentalement les classes préparatoires. Elle a alors demandé à ceux qui disposait déjà de la leur de l'énoncer puis elle a poursuivi la distribution, allant d'une table à l'autre, les mains se levant l'une après l'autre, en mesure...
La note de Brion, un seize - elle aurait pu aussi bien mettre un dix-huit - fut accueillie par un murmure d'admiration et, crut-elle discerner, de satisfaction générale. Il était donc connu et sa réputation n'était plus à faire. Brion tendit la main, la regarda à peine (elle n'eut pas même le temps d'esquisser un sourire), remercia tout simplement et replongea dans ses pensées. Elle a tout juste noté au passage son visage impassible, pas même éclairé d'une lueur de fierté dans les yeux... Elle en a été un peu déçue mais lorsqu'elle repensa au geste banal avec lequel il avait saisi sa copie, elle se consola en pensant qu'elle n'avait rien à attendre de chacun, qu'elle ne faisait que son travail et que toute démonstration particulière vis-à-vis d'un élève serait inopportune et ne pouvait que flatter son propre ego. Elle n'avait en aucun cas à quêter une quelconque reconnaissance de l'un ou l'autre d'entre eux. Conserver une neutralité, certes de bon aloi, mais rester libre. Tout autre manifestation aurait été hors de ses fonctions et de ses compétences.
Elle ne s'est pas attardé. Elle est passée rapidement à la copie suivante sans marquer la moindre pause,suspension qui si elle avait duré trop longtemps aurait pu être notée comme un signe distinctif pour cet élève, attitude dans laquelle elle était de toujours résolue à ne pas tomber. Elle abhorrait tout favoritisme. Elle serait plutôt tentée, le cas échéant, de le reprendre avec plus de sévérité que n'importe quel autre élève et c'était bien cette philosophie qui lui avait fait préférer mettre un seize à sa copie plutôt que le dix-huit, jugé au final, trop enthousiaste.
Quand elle a terminé sa distribution...
Wahhhh ! Tout au long de ma lecture, j'ai été à la place de la prof avec ses doutes et ses angoisses, ses attentes aussi...
RépondreSupprimerC'est si réaliste. Passionnant !
Que va-t-il se passer après la distribution des copies ???
Je viens de lire "la rentrée" 2-3-4-4suite d'une traite, je reviens demain ou après demain si la suite se fait attendre :-))
RépondreSupprimerBravo !!!
Ah le prof qui met 16 pour ne pas mettre 18 - une maladie du système scolaire français. Il faut que le nombre rentre dans le moule. Ni mauvais (ça dérange), ni trop bon - ça dérange aussi.
RépondreSupprimerHistoire tragique que je suis avec passion. Je me demande vraiment comment ça va tourner. J'histoire entre la torride histoire d'amour et le suicide... à moins qu'il n'y ait une troisième voie ?