mercredi 27 février 2013

( 142 )

4 septembre


     Maintenant, revenu en ces lieux, quand je pense à Elle (et je ne fais qu'y penser constamment), un serrement viscéral difficilement compréhensible me traverse immédiatement le corps, s'y fixe, s'incruste, irradie, s'indure et me tenaille, me serre, m'étouffe et ne me quitte plus, soit qu'il résulte de l'angoisse de ne pas la retrouver jamais, soit qu'il provienne de la trop forte et soudaine jubilation que fait grandir l'espoir de la rencontrer, là, un jour prochain (j'en suis certain), peut-être demain, peut-être à l'instant même, comme par inadvertance, au détour de cette rue... L'espoir traversé de pensées contradictoires, d'interrogation sans fin, de folles aspirations... Impatiente et déraisonnable attente.



dimanche 24 février 2013

( 141 )

4 septembre


      Lui : Que me manquait-il pour que son image se dessine ? Le décor. Et les lieux retrouvés me font mal.

      Le Cynique : Et les questions que tu te poses et celles que tu laisses dans l'ombre, qu'en fais-tu que tu n'en dises rien ?

      Lui : Elle, quand je ne l'attendais pas.

vendredi 22 février 2013

( 140 )

3 septembre


     Lui, retrouvant les lieux familiers, déambulant dans la ville encore sous le coup de l'été, il pense naturellement à Elle, au jour où ils se rencontrerons à nouveau. Il y croît, fermement. De toutes ses forces. Et au rythme de ses pas, au milieu de son errance, voici que le visage tant recherché, tant invoqué, tant imploré, surgit par intermittence à partir d'infimes détails aperçus au passage et qui évoquent immédiatement par similitude ou par différence, l'être tant espéré. Oui, en ces lieux retrouvés de son amour, il la retrouve plus aisément, plus docilement, naturellement.

jeudi 21 février 2013

( 139 )

2 septembre


     Tu étais là depuis longtemps, autour de moi, dans la blondeur du monde et je ne te voyais pas ! Maintenant, je sais te repérer en tes métamorphoses, dans un visage, un brin d'herbe, un souffle du vent, la forme d'un visage, une certaine lumière, tel éclairage... Je ferme les yeux et tu es là et me souris.


mercredi 20 février 2013

( 138 )

2 septembre


     Elle s'avance... Je sais qu'Elle est en route, la devine déjà depuis l'autre bout de la plage. Sans bruit, sur le sable fin, Elle s'avance, Elle vient vers moi. Elle, tout sourire, toute clarté, toute pureté. Dans l'innocence de sa jeunesse.



mardi 19 février 2013

( 137 )

2 septembre


     Lui : De toujours Elle était en moi, née en même temps que moi, grandissant avec moi. Une part de mon être. Ensemble, indissociablement liés.

     Lui : Comment se nomme ce lieu, ce rivage qui va à sa rencontre, où je l'attendais, ce paysage qui me bouleverse si durablement et qui cause tant d'émois inapaisables et douloureux ?

     L'Autre : Tu le sais bien -  on n'attrape pas les mouches avec du vinaigre - tu le connais bien le nom de cet attrait. Il n'a rien d'intellectuel, rien d'éthéré...

     Lui : Pourquoi avoir attendu tout ce temps, pourquoi Elle et pas une autre ? Elle, là, présente, de toujours.

     L'Autre : Tu rêves ! Éveille-toi !













dimanche 17 février 2013

( 136 )

2 septembre


     Je vais et vogue n'attendant que le cri de la vigie qui m'annoncera la rencontre tant espérée. Mer monotone et de patience. Vigie moi-même guettant le signe qui viendras : surprise sans surprise. Elle, elle-même, en pointe de terre. Que la route est longue jusqu'à Elle mais ne vit-Elle pas en moi, si proche et si lointaine, mon Amérique à moi ?


samedi 16 février 2013

( 135 )

1er septembre


     Lui : Quel jour ?

     L' Autre : Promesse déjà non tenue.

     Lui: Je ne dis plus rien, me replie dans le silence limbique ; que son nom, pour moi, rien que pour moi, répété en moi,en silence, formé sur mes lèvres, ne le laissant naître. J'attendrais qu'Elle vienne me faire revivre, me rende à la vie pour le dire.

jeudi 14 février 2013

( 134 )

1er septembre


     Lui : J'attends, sage et fébrile, c'est selon, je ne sais quel évènement. Une rencontre. Que puis-je imaginer de la rencontre avec Elle ? Et si personne n'était au rendez-vous, me souffle une voix que je n'ai jamais réussi tout à fait à dominer, à faire taire ? J'attends, négligeant toute appréhension tel un cisaillement qui traverse comme un éclair mon corps. Je voudrais ne plus rien dire, ne plus rien ajouter avant le jour attendu, tant espéré. 



mercredi 13 février 2013

( 133 )

1er septembre


     Il pense : Ce qui manque à cette narration en forme de souvenir, c'est le temps, la durée de l'attente. Elle, toujours. Constamment. La joie demeure même après la peine.

     Mémoire : On fait naître ce que l'on croyait seulement ressusciter. La mémoire inventive. La mémoire invective.

mardi 12 février 2013

( 132 )

1er septembre


     Lui : Oui, je pense à Elle chaque minute. Nous nous sommes rencontrés pour toujours.

     L'Autre : Non, vous vous êtes seulement croisés.

     Le Raisonneur : Cette longue absence (une absence sans fin, dis-tu !), ce long silence supporté, n'est-ce pas le moment pour toi de conclure cette histoire ? Qu'attends-tu d'un supposé retour, que tu penses plausible ? Cela ressemble fort à une poursuite illusoire et dérisoire de ce qui toujours t'échappera, qui ne peut que t'échapper parce que sans substance.

     Le Vulgaire : L'interrogeras-tu (oui, je sais, cela met en scène la jalousie, la convoque) sur ses aventures à Elle ? Pose lui donc la question. La problématique de ses plaisirs ou de l'argent. Oseras-tu te montrer sous cet angle ?

     Lui : Avec cet échange-ci, cru et cruel ... que je récuse, que je ne peux admettre...

     Le Raisonneur : Tu t'obstines...

     Lui : Avec cet éclairage brutal, je " vois " son visage, par instant, plus précis, comme un démenti à ces propos inconscients. Elle ne peut être Ça !

     Lui : Tous ces autres qui convergent vers moi, s'abattent sur moi, se liguent, se conjuguent et m'étouffent.

     Lui : Pourquoi un tel désir ? Un besoin ? De possession, d'impartage, d'absolu habitent-ils en moi ?

     Lui : Je conclurai que parvenu au plus profond de mon désir obscur, de forêt silencieuse.

     L'Autre: Tu te réfugies dans les hauteurs, tu fuies, déplaces les choses réelles, les décales, les nies.

     Lui : C'est en ajoutant un peu plus de lumière, de sa lumière à Elle, que je gagne un peu de sa souriante présence, ses traits se dégageant, son visage retrouvant sa légèreté que je parviens à reconstituer son image. Affaire douloureuse de volonté et de mémoire.

      L'Autre : Tu t'illusionnes : la jeunesse est trompeuse. Tu fuis devant cette évidence !

      Le Raisonneur : Elle te trompe. Elle joue, profite, t'exploite. Oui, Elle profite de toi. De plus, Elle est l'inconscience même.

      Le Vulgaire : Combien la paies-tu ?

      Lui : Je frémis. Je tremble à vous entendre. Vous me blessez mais ne m'achèverez pas. Je crois à la joie. Sa joie, à Elle. La joie du premier jour.







lundi 11 février 2013

( 131 )

1er septembre


     Lui : Je ne repense pas à Elle. Je n'ai jamais cessé de penser à Elle. Son image toujours présente bien que lointaine le plus souvent. Une image si difficile à en former les contours. Elle ne prend un peu plus de netteté qu'en y ajoutant de la clarté. Oui, en ajoutant de la lumière qui irradie les bords. 

     Je ne l'avais jamais vue si jeune.

     Lui : Notes éparses pour un visage à recomposer. Morceaux brisés d'une rencontre.



dimanche 10 février 2013

( 130 )

31 août


     La joie plus profonde que la peine quand déjà si profonde est la douleur.

     Lui : Je n'ai plus rien à dire - depuis si longtemps - rien à dire qu'à répéter ton nom sans fin comme un talisman.

samedi 9 février 2013

( 129 )

27 août


     Lui : Pourquoi ai-je tant  de peine - oui, une peine chagrine et immense - et pas seulement des difficultés, à recomposer son visage ?

     L'autre : Ridicule obstination.

     Lui: à susciter, n'observer, retrouver  qu'une pâle image, voilée, comme un soleil déteint et sans chaleur, rien qu'un peu de lumière, à peine une lueur... Pourquoi ton image m'échappe-t-elle, pourquoi te dérober ainsi alors que tant de visages anciens me reviennent avec tant de netteté, immédiatement, à la demande, à ma mémoire ? Où es-tu ? Pourquoi cette fuite, cette perte en moi ?


jeudi 7 février 2013

( 128 )

17 août


     Dans la nuit - mais est-ce bien un hasard ? - des pensées désespérées - Elle, me moquant, me narguant, me trompant. Elle, sans aménité. 

     L'Autre : te trompant ! Que t'aurait-elle promis pour te tromper ? Ouvre les yeux bienheureux naïf. Elle suit sa voie, son chemin. Tu t'y trouves, certes, mais sur le bord comme une borne à laquelle seul un chien revient.

mardi 5 février 2013

( 127 )

16 août


     Le raisonneur, railleur : C'est ta jeunesse perdue que tu regrettes, que tu veux retrouver. Les premiers signes de vieillissement sur ton corps, tu ne veux les voir ! Tu ne les vois pas !

lundi 4 février 2013

( 126 )

14 août


     Le raisonneur : Tu t'enflammes, attises le feu, t'exaltes. Tu es seul, bien seul, certes. Des fantasmes que tu nommes passion, amitié, que sais-je encore et qui ne soit délire.

     Lui, pendant le concert, frappé par le programme qu'il écoute : Je me souviens; je suis seul une autre fois; rêve; mon cœur bat; le rendez-vous; seul comme toujours. Oublier, si tôt, si vite; j'étais avec Elle. Je voudrais dans un mot; le jour est arrivé. Mélodies russes qui toutes me la désignent.




samedi 2 février 2013

( 125 )

12 août


     Brume. Le soleil est caresse, et l'air, le vent alentour, les herbes grises, le nuage qui passe et défait. Elle.

vendredi 1 février 2013

( 124 )

10 août


     Amitié sans retour, dit-on. Comment entendre cela ?

     Il parle. Seul. Possédé par la plus grande tristesse, celle de l'absente. Soliloque obligé.

     L'autre, le raisonneur : Ce n'est plus (si cela jamais fut) le quand mais le comment qui questionne. Pas tant les circonstances que les dispositions qu'Elle affichera lors des retrouvailles qui devraient l'inquiéter.

     Le raisonneur, encore : Résumons-nous, épurons. Lui : Quelle horreur ! Épurer ! Mettre à plat la réalité.

     Lui : Tout ce que je dis n'est pas à boire, certes. Mais de là à me dépouiller, la chair à nu...